Nous avons eu la religion, la philosophie, la psychanalyse ; nous avons maintenant le développement personnel.
Nous ne voulons plus vivre plus tard, nous voulons vivre maintenant. Que nous importe de comprendre si nous avons les solutions ? Nous ne sommes pas malades, nous avons juste oublié notre moi profond. Nous voulons jouir de la vie, la croquer à pleines dents, et il n’est pas un jour sans que mon réseau social ne me propose une citation du Daïla-Lama, une vidéo de coaching sponsorisée bien-être, les dix choses à faire le matin au réveil, les vingt avant de se coucher ou comment engranger les succès en se déstressant. On parle de synchronisation, d’intention, d’énergie, de lâcher-prise et de moment présent. Avec un tel programme, il semble presque impossible de ne pas être heureux. Justement.
Cet impératif du bonheur, à base de recettes simples et compréhensibles par tous, nous interdit tout sentiment de manque, d’imperfection ou d’isolement. Eh quoi ? Je pratique le moment présent, les intentions, les gratitudes, je pratique les accords toltèques, je ne critique pas, je ne fais aucune supposition, je fais toujours de mon mieux, j’ai même arrêté la viande et le café, et je suis malheureux ? Alors ?
Je me demande si cette course à l’épanouissement personnel ne renforce pas le sentiment d’échec. Ce bonheur est trop simple, à portée d’une citation Facebook. Et si la vie était un peu plus complexe ? Et si les émotions négatives, les difficultés et les épreuves telles que la maladie ou la mort en faisaient aussi partie ? L’ouverture vers d’autres spiritualités est appréciable mais poussée à l’extrême, cette ouverture n’est-elle pas synonyme de repli sur soi et d’enfermement ?