« C’est dommage : tu as chopé la pire des allergies. » Comme à son habitude, S. penchait vers le noir.
J’étais pourtant assez fière de moi. Le matin même, j’avais découvert la raison de mes toux, étouffements, rhinites à répétition et démangeaisons glutturales : j’étais allergique aux acariens et graminées. « Tu n’as vraiment pas de chance. » Au contraire. Je me trouvais hyper chanceuse, chanceuse d’avoir découvert la raison de ces inconforts.
« On se revoit dans trois mois », m’avait dit l’allergologue, une ordonnance à la main. Il était urgent de ne rien faire et, maintenant le diagnostic posé, observer les symptômes. Elle n’avait pas poussé à la consommation, pilules plein la bouche et Ventoline plein le nez : « Seulement si vous êtes incommodée. » J’avais décidé de ne pas l’être. Je me suis débarrassée des coussins en plume d’oie et des bouquets de fleurs séchées, je suis allée fouiller derrière les placards et suis entrée chez Guayapi :
– Vous connaissez le magasin ?
– Non.
– Nous sommes connus pour nos compléments alimentaires, extraits de plantes d’Amazonie et du Sri Lanka.
– Vous avez quelque chose contre les allergies ?
Il m’a regardée d’un drôle d’air : « Vous êtes sûre de manger correctement ? » J’ai réfléchi ; dans le doute, j’ai acheté de la griffe de chat. J’ai changé les rideaux, projeté l’achat d’un nouvel aspirateur, déposé la couette au pressing. J’étais prête à affronter les petites bêtes.
J’ai fini par inventer un nouveau jeu : à chaque toux, je cherche la plante ou l’arachnide. Je devrais être dévastée, mais ni mon corps ni mon esprit ne le voit ainsi. Pour un peu, je déborderais de gratitude. Aurélia, ma biche, ne deviendrais-tu pas un peu tarée ?
All is well. Everything is working out for my highest good. Out of this situation, only good will come. I am safe. Louise Hay