Le cauchemar de Dracula de Terence Fischer (1958)
Il y a quelques jours, une personne me causa bien du souci.
Je l’ai rencontrée il y a plusieurs mois. Je la trouvais fragile et désaxée, mais cultivée et d’agréable compagnie. De sa voix mielleuse, déjà, elle diffusait son venin. Je ne le savais pas : j’étais dans la confiance, pas dans la clairvoyance. Du jour où nos rapports se sont renforcés, la situation s’est dégradée. Des problèmes apparaissaient sans cesse. Je suis plus rationnelle que mystique, mais j’étais persuadée que sa fréquentation m’impactait défavorablement. Comme si, non contente de sa situation personnelle difficile, elle tentait inconsciemment de foutre en l’air la mienne. Elle ne pensait pas à mal, mais cette personne était gorgée d’ondes négatives. De sa bouche, sortaient vipères, crapauds et venins. J’étais à deux doigts de l’imaginer en jeteuse de mauvais sorts. Je ne pourrais m’en détacher avant longtemps. Que faire ?
V. fait un travail spirituel depuis de nombreuses années et s’est envolée dans des sphères assez éloignées des miennes. Nous nous retrouvons néanmoins autour de thèmes tels que le yoga, la méditation et les énergies. Je l’ai appelée ; elle m’a conseillée. De cet échange, est né le début d’une prise de conscience. Je devais d’un côté me solidifier, de l’autre me libérer.
Nous savons tous comment nous ancrer davantage : dormir, faire du sport, du yoga, manger léger et équilibré, boire de l’eau, se promener dans la nature, regarder le ciel, méditer. Un travail de longue haleine généralement couronné de succès. Il en est de même de la libération des entraves. Les miennes étaient relationnelles. Je les ai coupées.
Autour de moi, gravitaient quelques vampires, pompeurs d’énergie et de temps, réclamant toujours plus de présence, soutien, écoute, compréhension et accompagnement. Il n’y en avait pas beaucoup. C’était déjà trop.
Celui qui ne parle que de soi, celui qui enchaîne les catastrophes et qui ne vous demande rien d’autre que d’écouter ses problèmes – il a toujours un problème –, celui qui vous critique, vous et vos proches, vous répète les vilaines choses que l’on colporte sur vous – pour votre bien, vous vous en doutez, celui qui s’énerve pour un rien, réclame une réponse immédiate à tous ses messages, et vous finissez exsangue et épuisé, rond comme un cul de bouteille sous le canapé. Vous les remettez ?
Celui qui ne vous demande jamais comment vous allez, n’a aucune idée de qui vous êtes ou de ce que vous faites. Posez-lui quelques questions : quel est mon métier, ma plus grande peur, mes deux passions, qui sont les membres de ma famille, l’objet de mon association, quand est sorti mon dernier livre, quel est le nom de ma maison d’édition ? Il ne pourra y répondre mais vous dira qu’il ne va pas bien et qu’il a besoin de votre présence. Quand es-tu libre cette semaine pour venir me voir ?
Comme beaucoup d’entre vous, j’ai été élevée dans la tradition judéo-chrétienne, dont l’un des piliers principaux est la culpabilité. Vas-tu les abandonner aujourd’hui alors qu’ils ont besoin de toi ? Pour la combattre, j’ai fait la liste de ce que j’avais vécu ces dernières années et que nous avions partagé. C’était vite vu. Savoir pardonner, devoir fréquenter une personne nocive, écouter un point de vue contraire ou rendre service ne signifie pas nécessairement devoir tout endurer. L’échange n’est pas que dans un sens. Alors j’ai coupé.
Immédiatement, j’allais mieux. Je me sentais plus légère, comme délestée d’un poids. Des bonnes nouvelles ont commencé à arriver. J’en ai parlé à V. C’est elle qui a mis les mots sur ce que je vivais : tu as fait de la place dans ta vie, pour toi.