Les Peutes

Beatles Ashram, Swarg Ashram, Rishikesh, Uttarakhand, India

Beatles Ashram, Swarg Ashram, Rishikess, Uttarakhand, India – © Shubhashis Roy


« Tu comprends, me dit-elle, les peutes m’emmerdent. » Les peutes ? De quelle secte s’agissait-il ? J’imaginais un groupe religieux d’obédience catholique, vaguement intégriste. Ou un groupe spirituel un peu barré. Je n’étais pas très loin.

« Les peutes, répétais-je. » Elle s’amusa de son néologisme. « Oui, les peutes. Ici, à l’ïle de Ré, les opportunités professionnelles sont limitées : pêcheur, docker, agent immobilier ou de tourisme et tu as fait le tour. Sinon c’est agriculteur. Petite population l’hiver qui enfle l’été, et des Rétais d’adoption à la catégorie socio-professionnelle généralement élevée. Parmi eux, des femmes qui cherchent une activité. La plupart du temps, elles deviennent peutes. Elles ont généralement fait une retraite d’une poignée de semaines en Grèce ou à Majorque et de retour en France, elles décident de transmettre leur incommensurable savoir à des personnes qui n’ont rien demandé. C’est comme ça que, sans aucune formation particulière, elles deviennent peutes : psycho-thérapeute, art-thérapeute, hypno-thérapeute, zoo-thérapeute, sophro-thérapeute, danse-thérapeute, drama-thérapeute, équi-thérapeute, biblio-thérapeute… Bref, tu as compris le concept. »

La plupart de mes amies en transition professionnelle étaient devenues professeures de yoga. « C’est pareil, m’expliqua-t-elle. Toutes des peutes. Les professeures de yoga, de méditation, de thérapie créative, les énergéticiennes et les veganes. Toutes pareil. Elle m’emmerdent. » Puis elle alluma une cigarette.