La nuit du premier janvier, nous nous retrouvons chez P. pour partager la pizza. Après dîner, elle sort un jeu de tarot. Chacun notre tour, nous tirons une carte. Devant moi la reine des épées. « Cette année, il s’agit de faire tomber les masques. », me dit-elle.
Ça m’est revenu plus tard — sur le moment, je ne suis pas sûre de croire en ces choses.
Quelques mois plus tard, je réfléchis à ma biographie. Je la trouve triste comme une porte de prison. J’aimerais la rendre plus légère. J’ai trouvé le ton, pas la matière. Je tourne en rond.
Quelques jours plus tard, il me vient une idée. Je ne sais pas ce qu’elle vaut mais on peut essayer. Sur Facebook, j’en appelle à mes amis : « Si vous deviez me décrire en cinq mots ? » Peut-être en sortira-t-il quelque chose ? J’attends.
Quelques heures plus tard, les commentaires commencent à tomber. Une dizaine de personnes se prêtent au jeu. Le lendemain, j’en fais le compte-rendu à G., mon amie italienne de passage à Paris.
Je serais littéraire, intellectuelle et intelligente, sauvage, secrète et solitaire, indépendante ; je serais exigeante et volontaire, mais également généreuse, fidèle et attentionnée ; adorable, charmante et géniale sont des termes employés, de même qu’ouverte d’esprit, observatrice, rêveuse et voyageuse ; vous y trouverez également des références à l’engagement, la sincérité et la passion, un peu de sensibilité, de l’empathie.
« Si vous deviez me décrire en cinq mots ? » J’ai posté la phrase sans y réfléchir, un peu comme un jeu. Et ça donne ça. J’ai devant les yeux un résumé de moi-même. C’est moi sans être moi ; c’est une partie de moi, ou du moins, moi telle qu’on me voit.
Immanquablement deux questions viennent à l’esprit : est-ce ainsi que je me vois ? Est-ce ainsi que j’aimerais être vue ? Et je me suis souvenue de la reine des épées. Ce soir-là, G. était là. C’est d’ailleurs une de ses remarques qui m’a mis la puce à l’oreille : « C’est toi, mais ce n’est pas toi, c’est une partie de toi. Tes amis te décrivent telle que tu te présentes sur les réseaux sociaux et sur ton blog. C’est ainsi que tu te mets en scène, c’est ainsi qu’ils te connaissent. Il y a toute une partie que tu caches et qu’ils ne connaissent pas. » Et j’ai repensé à la reine des épées. « Cette année, il s’agit de faire tomber les masques. »
Si je devais me décrire en cinq mots, quels termes utiliserais-je ? R. a raison : ce n’est pas un exercice facile.
Mais je suis d’accord pour faire tomber les masques. Cinq adjectifs, un par semaine, pourquoi pas ? Secrète, mystérieuse, énigmatique… Le premier étant découvert, restent quatre mystères à venir.
C’est parti — indice : joueuse n’en fait pas partie !