Emilia Perez, enfin

Karla Sofia Gascón dans Emilia Perez de Jacques Audiard


J’ai enfin vu le dernier Jacques Audiard. Sept semaines après sa sortie, il était temps. La salle était bien remplie, ça m’a fait plaisir. Les cinémas indépendants et les Parisiens du Quartier Latin se portent bien.

Emilia Perez est une comédie musicale. Ce qui n’apparaît pas nécessairement au visionnage de la bande-annonce. Ce qui est heureux : je n’aime pas les comédies musicales. Si je l’avais su, j’aurais probablement passé mon tour et raté le voyage.

Emilia Perez est un film français de langue espagnole, qui se déroule au Mexique mais tourné en plateau en France avec une équipe de tournage française et des acteurs d’origine hispanique, j’espère que vous me suivez. En dehors de ces derniers, je n’ai pas noté un seul nom à connotation espagnole dans le générique – il faudrait vérifier.

Emilia Perez parle des femmes, de toutes les femmes. Des mères, des poupées, des hétérosexuelles, des lesbiennes, des transgenres, des femmes battues, des infidèles, des femmes des cartels, des indépendantes, des ambitieuses, des amoureuses, des Blanches, des Noires, des Indiennes. De toutes les femmes. Et cela ne parle pas d’amour, si, d’amour maternel, d’amour fraternel, d’amour de son prochain, mais pas de sexe, ou très peu, un assaisonnement. Et ça fait du bien.

Emilia Perez parle des changements de vie, de ce que l’on peut changer, effacer, gommer, et de ce qui s’imprime, de ce que l’on porte en soi, malgré soi. Emilia Perez chante qu’elle est moitié moitié, moitié homme moitié femme, moitié père moitié tante, moitié pauvre moitié riche ; elle est effectivement tout ça à la fois. Chaque personne qui aspire au changement porte en soit son être passé et son être en devenir. Une cohabitation non voulue mais nécessaire. On n’efface pas ce que l’on a été.

Emilia Perez parle de rédemption et de rachat, Emilia Perez parle d’ONG, de disparus et de familles de disparus, et là, forcément, on bascule sur un sujet qui m’interpelle (lire Les militants – Le CFDA).

Emilia Perez est une œuvre cinématographique totale, excessive et irréelle, ponctuée de violence, de rebondissements et de bons sentiments, une oscillation entre spectacle et réflexion. Vous irez un dimanche après-midi de pluie sans connaître véritablement son sujet et vous en sortirez vivifié, réénergisé pour la journée. Et vous m’en remercierez !


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