L’ouvreuse

Une ouvreuse dans les années 193

Une ouvreuse dans les années 1930


Elle portait la soixantaine sur son visage. Pas laide, mais pas jeune non plus. Elle semblait bien vieille pour un tel métier, puis j’ai pensé à mes amies artistes et retraitées ; c’était probablement l’une d’elles. Pas jeune donc, mais avec de l’allure, fine, tout de noir vétue, à courir dans tous les sens, un peu paniquée. Comme d’habitude depuis le début de la crise sanitaire, la salle était à moitié vide.

Nous avons patienté un temps en haut de l’escalier. « Public ou privé, le théâtre Montparnasse ? », ai-je demandé à I. De l’autre côté du balcon, l’ouvreuse s’est agitée dans tous les sens : « Ne bougez pas, surtout ne bougez pas, j’arrive. » « Privé », m’a-t-elle répondu en sortant une pièce – alors que dans le théâtre public, les placeurs sont rémunérés, dans le privé, ils sont souvent payés, en partie ou en totalité, au pourboire.

Elle nous a installées puis a balayé le balcon désert. « Attendez un moment, je vous déplacerai. » Un peu plus tard, elle est allée parler à une bande de jeunes installée au premier rang. « Je ne le savais pas, a meuglé l’un d’eux. Mais vous savez, je n’ai jamais de liquide : je paye tout en carte bleue. » J’ai été désolée pour la dame et agacée contre le sale gosse. « Ces jeunes qui ne connaissent rien deviennent lassants. Tiens, par exemple, les étrennes… »


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